Salutations, je suis Dr. Aboubacar Keita, phytothérapeute.
Dans notre pratique clinique à Bamako, nous voyons quotidiennement les séquelles débilitantes du paludisme. Si la phase aiguë est traitée, un symptôme persiste et inquiète profondément les familles : la perte d’appétit (anorexie post-palustre).
Un corps affaibli par la maladie a besoin de nutriments pour reconstruire ses défenses, produire des globules rouges et retrouver l’énergie. Sans appétit, la convalescence s’éternise, la fatigue s’installe et le risque de rechute ou d’autres infections augmente.
Heureusement, la riche pharmacopée africaine nous offre des solutions douces et extrêmement efficaces pour « réveiller » l’appétit et soutenir la récupération. Voici les 4 plantes que je recommande, après des années d’observation et d’échanges avec les anciens.
Pourquoi le Palu nous Coupe-t-il l’Appétit ?
Le Plasmodium, le parasite responsable du paludisme, provoque une tempête inflammatoire dans l’organisme. Cette réaction, nécessaire pour combattre l’infection, affecte également le système digestif et les centres de la faim dans le cerveau. S’ajoutent à cela les nausées, l’altération du goût due aux médicaments et la fatigue générale, qui finissent de couper toute envie de manger.
La convalescence est donc une étape cruciale. Selon une étude menée en 2019 au Nigeria, près de 65% des patients rapportent une perte d’appétit significative pouvant persister jusqu’à deux semaines après la fin du traitement antipaludéen.
Les 4 Alliées Végétales pour une Convalescence Réussie
1. Le Vernonia amygdalina (Feuilles de Bitter Leaf) – La Reine de la Dépuration
Nom commun : Laitier, Bitter Leaf (anglais), Ewuro (Yoruba), Ndole (Cameroun).
Pourquoi elle marche : C’est la plante la plus emblématique pour les convalescents. Son amertume prononcée est la clé de son efficacité. Elle stimule puissamment la production de sucs gastriques et de bile, préparant le système digestif à recevoir et à assimiler la nourriture. De plus, ses propriétés hépatoprotectrices aident le foie, souvent malmené par la maladie et les médicaments, à se régénérer.
Comment l’utiliser :
- Décoction (méthode la plus courante) : Faire bouillir une poignée de feuilles fraîches ou séchées dans 1 litre d’eau pendant 10-15 minutes. Laisser refroidir et filtrer.
- Posologie : Boire un verre (250 ml) de cette décoction, 30 minutes avant les repas principaux. Son goût très amer peut être adouci avec un peu de miel pur.
Témoignage : « Après mon palu, je ne tenais plus debout. Ma mère a insisté pour que je boive l’infusion de Bitter Leaf. Les deux premiers jours, c’était difficile à avaler, mais dès le troisième jour, l’odeur du riz au poisson m’a mis l’eau à la bouche. J’ai retrouvé mes forces en une semaine. » – Amadou, 32 ans, Dakar.
2. Le Moringa oleifera (Nébéday) – Le Arbre de Vie Nutritionnel
Nom commun : Nébéday, Ben oil tree, Ewe Igbale (Yoruba), Zogale (Haoussa).
Pourquoi il marche : Le Moringa est un concentré de nutriments. Riche en vitamines (A, C, B), en minéraux (fer, calcium, potassium) et en protéines, il comble les carences nutritionnelles liées à la période de jeûne forcé. Il ne stimule pas l’appétit à proprement parler, mais il donne à l’organisme l’énergie et les matériaux dont il a besoin pour se reconstruire, ce qui enclenche un cercle vertueux : plus de force -> besoin de plus d’énergie -> retour de la faim.
Comment l’utiliser :
- Poudre de feuilles séchées : C’est la forme la plus pratique. Ajouter une à deux cuillères à café bombées dans les soupes, les bouillies, les sauces ou dans un verre d’eau ou de jus.
- Feuilles fraîches : Les incorporer directement dans les sauces ou les plats de légumes, comme des épinards.
Lien externe : Pour en savoir plus sur la composition nutritionnelle exceptionnelle du Moringa, vous pouvez consulter cette fiche de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture).
3. L’Ocimum gratissimum (Basilic Tropical) – L’Apéritif et l’Antispasmodique
Nom commun : Clou végétal, Basilic africain, Efinrin (Yoruba), Daidoya (Haoussa).
Pourquoi il marche : Ce basilic au parfum puissant de clou de girofle est un excellent tonique digestif. Il combat les nausées, réduit les ballonnements et les spasmes intestinaux, qui sont autant de freins à l’alimentation. Son arôme stimulant aide à « ouvrir » l’appétit.
Comment l’utiliser :
- Infusion : Verser de l’eau bouillante sur une poignée de feuilles fraîches. Couvrir et laisser infuser 10 minutes. Filtrer et boire tiède.
- Utilisation culinaire : Hacher finement les feuilles et en saupoudrer sur les plats.
4. Le Zingiber officinale (Gingembre) – Le Classique Universel
Nom commun : Gingembre, Jinja (dans de nombreuses régions), Atale (Yoruba).
Pourquoi il marche : Bien que non originaire d’Afrique, le gingembre s’est parfaitement intégré à la médecine traditionnelle du continent. C’est un anti-nauséeux scientifiquement prouvé [lien vers une étude sur les propriétés antiémétiques du gingembre]. Il est parfait pour lutter contre les haut-le-cœur qui surviennent à la simple idée de manger.
Comment l’utiliser :
- Infusion : Râper un morceau de gingembre frais (2-3 cm) et le faire infuser dans une tasse d’eau bouillante. Ajouter du citron et du miel pour un breuvage réconfortant et efficace.
- Jus : Extraire un peu de jus et en ajouter quelques gouttes dans un verre d’eau.
Précautions et Conseils Importants
- Consultation Médicale Obligatoire : Ces plantes sont des adjuvantes à la convalescence. Elles ne remplacent en aucun cas le traitement antipaludéen prescrit par un médecin. Assurez-vous toujours que le diagnostic et le traitement de la phase aiguë ont été correctement effectués.
- Commencez Doucement : Après une période de jeûne, il faut réhabituer l’estomac en douceur. Privilégiez des aliments faciles à digérer : bouillies de céréales (mil, riz), soupes, poissons maigres, fruits mûrs comme la banane ou la papaye.
- Hydratation : Boire de l’eau, des infusions ou des bouillons est primordial pour éliminer les toxines et lutter contre la faiblesse.
- Interaction Médicamenteuse : Si vous prenez encore des médicaments, espacez toujours leur prise de vos tisanes d’au moins 2 heures.
Conclusion : La Patience et la Sagesse des Anciens
Retrouver l’appétit après le palu est un processus qui demande patience et bienveillance. Les plantes que nous offre la nature sont des alliées précieuses pour soutenir ce retour à la santé. Elles agissent en synergie avec une alimentation adaptée et du repos.
N’oubliez pas : La santé est un héritage. En utilisant ces plantes, nous perpétuons un savoir ancestral qui a traversé les générations pour une raison simple : il fonctionne.
Prenez soin de vous et de vos proches.
Dr. Aboubacar Keita
Phytothérapeute, Promoteur de la Médecine Traditionnelle Africaine.